La remontée des eaux dans le Souf
Si la baisse du plan des eaux constatée aux débuts du
XXe siècle avait justifié la recrudescence des forages artésiens des années 50,
l’intensification de ceux-ci dans les années 70/80 avait provoqué l’inondation
et, du coup, le dépérissement des Ghoût traditionnels.
Paradoxalement, le dépérissement des palmeraies était
du, dans le passé, à l’appauvrissement de la nappe phréatique.
L’Administration pensait trouver la solution dans le
forage et le pompage de l’eau artésienne. Cependant, d’apparence simple, cette
nouvelle technique demande des calculs complexes, sous peine d’aboutir à des
résultats désastreux. En 1894, une première tentative a été poussée jusqu’à 100
et 150 mètres à Guémar puis à Tiksebt, mais sans résultat probant. Les services
compétents se résignèrent donc à attendre, avant de s’engager dans une
entreprise qui n’est considérée comme sûre que si elle est basée sur une
clairvoyante étude. Par bonheur, le Souf semblait encore en bonne santé, plutôt
épanoui et pouvant attendre. Ce n’est que cinquante ans plus tard qu’un forage
de prospection fut effectué à 400 mètres de profondeur à hauteur de Sif
El-Menadi (90 km d’El-Oued sur la route de Biskra). A la fin de l’été 1953,
l’eau douce jaillit avec violence de 435 mètres. Malheureusement, cette eau
abondante et exploitable ne pouvait pas être utilisée pour irriguer les ghouts
traditionnels au risque des les inonder et de provoquer par contre-coup leur
dépérissement. Il fut alors décidé d’exploiter ce forage dans les environs immédiats.
Au cours de l’été 1955, un forage beaucoup plus important dans la même nappe et
destiné à l'irrigation d'une palmeraie de 20.000 dattiers à Hamraïa (120 km d’El-Oued, également
sur la route de Biskra) a permis la sédentarisation de 400 familles nomades.
Dans cette zone pilote, terrains d’expériences coûteuses conduites par
l’Administration sous l’œil stupéfait des fellahs soufis, un verger
expérimental y avait également été créé avec succès, et où la plantation
d’arbres fruitiers, en plus des dattiers, avait donné des profits
immédiats et rentables.
La remontée des eaux dans le Souf
L’élévation du niveau des
eaux dans le Souf est aujourd’hui une réalité inquiétante et son influence sur
l’écosystème se fait ressentir de plus en plus. Les facteurs responsables de la
remontée des eaux et leurs conséquences pour l'environnement et la santé humaine sont de mieux en mieux cernés mais de plus en plus incontrôlables.
Assises sur une sorte de « banquise »
de sable, les oasis du Souf se révèlent particulièrement vulnérables aux variations du niveau de la nappe
phréatique. La baisse, comme la saturation de cette nappe, à priori imputables
à la croissance démographique et à l’activité humaine, ont été fatales surtout pour
les Ghoûts traditionnels (palmeraies), base de l’économie locale et fierté esthétique
de la région. Aujourd’hui, la population du Souf est condamnée à s’adapter et à
vivre avec la remontée des eaux au péril de son environnement et de sa santé. Au
fil des années, la poussée démographique et les activités économiques ont rongé
et altéré le fragile manteau de sable par l’épuisement de la précieuse nappe
phréatique sous-jacente d’une part, la dégradation et l’inondation du sol par
l’eau des forages artésiens d’autre part. La sauvegarde de l’écosystème est un enjeu majeur pour lequel
chaque citoyen a sa part de responsabilité et l'équilibre écologique du Souf est fortement tributaire de sa stabilité démographique. Les derniers forages artésiens, effectués
dans les années 70/80, dont l’honorable initiative était de satisfaire la
population en eau potable, se sont avérés une véritable bombe à retardement, ou
plutôt la goûte qui a fait déborder le vase. Ils ont particulièrement fragilisé
à long terme l’écosystème par la pollution de la nappe phréatique, devenue non
seulement inutilisable pour l’irrigation et la consommation, mais un vrai casse-tête
pour l’avenir économique et écologique de la région. La conséquence
est la transformation progressive du milieu naturel en espaces marécageux avec tous les risques de voir se
développer des foyers de moustiques et d'épidémies jadis inconnus. De fortes
averses pourraient causer des inondations et menacer les installations
économiques et les constructions, alors que d’ordinaire les pluies les plus
violentes n’avaient pas d'impact négatif sur l’environnement local. Au
contraire, les précipitations, aussi rares soient-elles, étaient très
appréciées et attendues surtout en automne pour leur rôle de rafraîchissement
du climat nécessaire à la conservation des récoltes.
Après l’engloutissement des
ghoûts, ce sera bientôt le tour des palmeraies de surface, des jardins, des
villages et des infrastructures de tous ordres. Les habitants les plus particulièrement
exposés commencent déjà par découvrir l’inondation de leurs maisons et de leurs
garages. Qui dit montée des eaux dit forcément dégâts et le pompage pour l’évacuation
des eaux indésirables est venu remplacer les travaux de désensablage d’autrefois.
En tout état de cause, des mesures concrètes sont actuellement envisagées pour tenter de remédier à la situation par des projets titanesques susceptibles de réhabiliter l’équilibre écologique du Souf.
Un important projet du secteur de l’hydraulique est en
mesure d’être réceptionné dès la fin de l’été 2009 et dont les travaux préparatoires
ont déjà atteint un taux d’avancement jugé satisfaisant. Quatre stations de
pompage pour l’évacuation des eaux indésirables (eaux stagnantes et eaux usées)
sont au menu du programme grâce à un dispositif considérable de canalisations
vers la dépression du Chott el-Haloufa près d’ Ouargla. Une partie des eaux collectées
sera utilisée localement pour l’irrigation de plantations. Entre autres, il est
prévu la rénovation des réseaux d’assainissement des eaux usées et des canalisations d’eau potable.